Premier amarrage: Altercation au pays des roches. {Mahou Yue}

L’endroit était insolite. Vraiment. Et c’était à se demander comment les habitants de cette ville avaient réussi à ériger un village dans une telle excavation. Oscillant sa tête de manière paresseuse de gauche vers la droite, vice versa, Salem observait depuis plus d’une minute, et d’un air pantois, toutes les structures des roches qui formaient la majeure partie de la vision panoramique qu’on pouvait avoir, depuis la motte de terre où il avait posé ses deux fesses, bras croisés. Apparemment, les éboulements ne se faisaient points rares. Il n’y avait qu’à voir l’agencement de certains blocs de pierres, pour se rendre compte de la situation dans laquelle cette campagne demeurait. Identique était ce dernier, pourtant, vu l'absence d'un éventuel dégât. Une concentration, et un regard minutieux sur ce coin ensuite, l’aida à comprendre l’ingéniosité dont avait fait preuve ses habitants. Hu ? Qu’est ce qui était étonnant finalement ? C’monde était tellement baroque et excitant, que voir ce genre de choses ne pouvait que le faire sourire. Et il n’était pas le seul. Après maintes escalades pour arriver vers ce village, tous les marins de l’équipage qu’il dirigeait, s’y ruèrent à l’aide d’un sentier correctement tracé, dans un tumultueux brouhaha. Mis à part la poussière qu’ils engendraient dans leur course, Alheïri, lui, riait de bon cœur. Après tout, n’était ce pas le premier village de north blue qu’ils visitaient la première fois pour la plupart, lui y compris ? La connaissance de nouvelles contrées avaient des senteurs délicieuses de grandes aventures. Et les vivre, était comme nager dans le bonheur… Même si à c’moment précis, il avait la grande flemmardise de bouger son cul, et partir visiter les lieux comme ses hommes…

Découragé, il finit par s’asseoir en tailleur, en mimant une grimace des plus laides. Ses lèvres semblaient former un trois, tandis que ses yeux plissés faisaient rire un de ses rares éléments qui étaient restés auprès de lui, bien qu’il ait donné quartier libre à son effectif d’un simple signe fluet de la main. Si on vous avait dit qu’il était grand colonel de la marine, vous n’auriez certainement pas cru un traitre mot de cette affirmation. Légèrement soupirant, Salem gratta l’sommet de son crâne qui subissait l’impériosité des rayons du soleil. C’pas pour dire, mais il faisait chaud. L’vent était affreusement sec. Une atmosphère presque désertique qui ne donnait même pas l’envie d’empiéter sur ces terres pas forcement hostiles. Un lieu plaisant pour subjectivement, parlant. Ses hommes, qui d’habitude n’aimaient pas le soleil, couraient à tout va, sans réellement s’y soucier. Faut dire que fouler la terre, c’est l’truc le plus tripant quand on passe deux trois semaines sur un navire, l’mal de mer en prime. Il les comprenait parfaitement, et il enviait aussi leur fougue, lui qui était pourtant un jeune homme de 28 ans. Vieux encore, cela pouvait se comprendre, mais Salem, c’était le CAS à part. M’enfin. Il eût fallu un grondement pour l’inciter à se lever, ce qu’il fit avec toute la peine du monde, tant sa grandeur. Il se sentait lourd là. Au passage, il avait soulevé sa veste d’officier de la marine, qu’il relogea sur ses épaules, en faisait tilt du grondement qui annonçait un futur éboulement. Mieux valait donc se protéger dans l’village. Emettant un bâillement des plus sonores, l’malabar se tira de tout son long en même temps, et finit par gratter frénétiquement son œil droit démangeant, le visage fatigué. Décidément, il lui fallait du bon rhum, et un bon lit, histoire de se caler et reprendre des forces. De toutes façons, le log pose n’était pas encore rechargé, puis il lui fallait bien évidemment faire des réserves, histoire de ravitailler le bateau concernant les victuailles manquantes. C’était un peu nécessaire à chaque escale ‘façons. Au pire, il buterait un monstre marin, mais il s’doutait bien que la viande d’un quelconque monstre n’allait pas être appréciable par tous, surtout qu’il n’était pas évident de les croiser dans ces mes, si ce n’est Calm Belt. Parce que bien que non obligé de par son grade, l’colonel du 20ème contingent aimait mettre ses hommes à leurs aises, et dans de bonnes conditions pour des futurs combats et batailles inévitables. Le respect et la confiance qu’on lui portait, étaient indéniables et presque inébranlables. De très bonnes choses d’acquises pour un leader de groupuscule.

De sa cadence placide, Salem arriva finalement au sein du village, trois minutes plus tard. La grande place bondait de monde, et il se réjouissait de voir quel le bon vivre était de mise. Pas l’ombre d’un pirate en tout cas. C’était bien. D’autant plus qu’elle ne semblait pas être pourvue de richesses inestimables à proprement parler. Mais bon, ne savait-on jamais. Feutrés ses pas étaient, parmi le flot de personnages qui allaient et venaient. Deux points le distinguaient malheureusement de cette étonnante marée humaine. Sa grande taille, et sa veste d’officier de la marine sur laquelle était marquée son grade. Ce qui bien évidemment, lui valait quelques œillades interrogatives, et parfois émerveillés pour certaines individualités. Souriant nonchalamment, il le leur remboursait, pour essayer de faire bonne figure, ses esprits étant focalisés sur de l’alcool à ingurgiter prestement. Partout où il passait depuis sa plus petite promotion, les choses s’étaient toujours passées ainsi. Une situation quelques fois stressante, quand le colonel se rendait compte que l’une de ses principales raisons d’être en tant que marine, était d’assurer la protection de la population mondiale. Une tache ardue qu’il se devait de remplir correctement.

L’officier haut gradé finit par arriver dans une ruelle quelconque. A force de pensées profondes, il s’égarait. Voulant rebrousser chemin, puisqu’étant en quête de n’importe quel bistro, Salem s’immobilisa net à la vue d’une silhouette féminine, et ne put s’empêcher de hausser le ton de manière brutale, bien qu’il n’ait voulu cela, sa gorge étant terriblement nouée par le besoin vital d’eau de vie.

• « Hey ! Vous là bas… »

Le pas emboîté, suivit de très près la parole. Alheïri s'approchait vraiment de la femme qui lui donnait dos, afin de lui demander l'indication salvatrice de sa gorge en feu.

• « Vous êtes du village ? Vous ne sauriez pas si l’on trouve un bistrot dans les parages ? »

Le rêve s’endort, mais
pas l’espoir.

« Absence » et « manque » allaient de pair dans cette vie, aussi longtemps que j’ai eu à y goûter, c’est ce que j’en ai constaté. Elles étaient sœurs et affiliés depuis si longtemps qu’il en devenait confus de tenter de les séparer. Quand l’une apparaissait à un endroit, l’autre pointait le bout de son nez quelques temps après, en instaurant à son tour un sentiment étrange et douloureux qui creusait notre cœur un peu plus chaque jour. Si l’on devait mettre des mots pour décrire ces sensations, aucun ne correspondrait justement… « vide », « dénué de vie » iraient à merveille pour satisfaire cette définition douteuse, mais comment expliquer le vide ? Le néant ? Le manque de vie ? Comment expliquer cette sensation que mon corps ressentait continuellement ?
C’était une voix qui appelait sans cesse. Elle était du genre têtue, à appeler encore après des années passées. Des mois que je n’avais pas pris la mer, des mois que ma meilleure amie était morte, des mois encore que mes mains étaient souillées de sang, entrainant un profond dégout de moi-même et de ce que j’étais devenue : cette pauvre fille qui se morfondait sur son sort à la moindre occasion… La guerrière du passé avait disparut, cette battante, cette vivante, avait péri avec Sachiko. En moins de temps qu’il n’en fallait pour une balle de 38mm d’atteindre sa cible… D’un coup de feu, tout avait été balayé…
Tel était mon début de journée, ma vision de la vie et mon humeur pour jusqu’à demain. Nostalgie, tristesse, apitoiement certain et j’en passe : je n’étais donc pas encline à la charité ou à toutes autres formes de gentillesse pour aujourd’hui. Sauf peut être si vous étiez du genre à le demander gentiment. Bien obligé pourtant de me lever et d’aller aider l’armurier à la boutique, je pris le pas en direction de mon travail dès que je finis de me préparer. Je sortis de chez moi, saluai ma grand-mère par la fenêtre de la maison, passai par une rue, puis par une autre (qui se ressemblaient toutes à dire la vérité, mais j’avais fini par me faire un vague plan dans ma tête pour arrêter de m’y perdre à force de patience, de temps, et d’innombrable « au secours, je sais plus ou j’habite ! » (Oui, j’étais du genre à me perdre dans une pièce de 3m²)… Aujourd’hui, j’étais trop rongée par le remord et les regrets pour pouvoir sérieusement être agréable ou aimable.

« Hey ! Vous là bas… »

Arrivée non loin de la place principale, une voix brute me stoppa dans ma marche. Je me retournai vers le possesseur de ce ténor un peu trop agressif à mon gout, pour voir à qui j’avais à faire. Une immense silhouette me barrait la vue, et j’en conclus très vite que c’était le géant qui m’avait interpelé. Sa veste d’officier de la marine attira mon regard, comprenant à qui j’avais à faire : un marin géant, plutôt haut gradé, dénué d’éducation, ou qui avait trop longtemps fréquenté les siens et qui se croyait trop supérieur aux autres pour tenter de leurs parler correctement…

« Tssss. »

Plantant mes pieds dans le sol, croisant mes bras sur ma poitrine, le toisant du regard, je lâchai mon premier pique acerbe de la journée, résultat de ma conclusion (certainement hâtive) et de ma mauvaise humeur…

« Pas très attentif pour un moustique, dis-donc. »

Je le regardai de haut en bas, le détaillant un instant. Ce que l’on pouvait constater de lui avant toutes autres choses, c’est vraiment son immense taille. Un mini-géant, pensais-je en arquant un sourcil. On n’avait pas souvent à faire à ce genre de spécimen dans le coin, pas sur l’île Rock-Town en tout cas. Une carrure imposante, un physique que l’on pourrait juger d’atypique : en contraste avec sa carrure de brute, son visage semblait serein, avenant et doux, ses cheveux grisonnés, ses yeux étaient masqué par des lunettes oranges… Rien qui n’aurait pu le fondre avec le commun des mortels. Je poussais un long soupir en le jaugeant un instant du regard du haut de mon mètre soixante (et comprenez à présent la différence de taille.). Hautaine comme je l’étais, le bougre n’allait pas s’en tirer comme ça. Pourquoi ?
La façon dont il m’avait accosté ne me plaisait pas du tout. Non mais, pour qui se prenait-il ? « Hey, vous la bas » ? Est-ce donc ainsi que l’on parle à une jeune fille ? Est-ce parce qu’il était vêtu comme un marin que cela lui permettait d’héler les gens de la sorte ? Sans s’excuser, ni même se présenter ? Et la bienséance ainsi que la politesse, on lui avait appris, dans la marine ? Apparemment non. Me raclant la gorge, je retroussai mes manches pour ensuite placer mes poings sur mes hanches pour ponctuer mon énervement. N’y avait-il rien d’autre qui me sortait plus par les yeux que les gens mal élevé ? Oui, les marins mal élevés.

« Déjà, on dit « bonjour mademoiselle », ensuite « excusez-moi de vous déranger » et éventuellement, on se présente. Là est la bonne conduite de tous les bons gentlemans, la politesse pour ainsi dire, chose dont tu as l’air de manquer cruellement. »

Relevant le regard pour planter mes yeux dans les siens, j’affichai d’ores et déjà l’art et la manière dont je me comportai. Un peu peste sur les bords, de mauvaise foi à ras-bord et surtout de mauvais genre, il s’était adressé à la mauvaise personne : une gamine insolente qui en avait un peu trop vu du haut de ses vingt ans et qui n’avait pas l’intention de se laisser faire… Il était clair aussi que je détestais tous ces marins qui se donnaient des passe-droits avec les gens sous prétexte qu’ils appartenaient justement à la Marine.

« Quand tu auras appris à accoster les filles comme il se doit, je te répondrais. »

Moi? Penible?... Oui.

[HRP : Pas top top, mais j'espère que ça t'ira ^^']

C’est dans l’attente véritable d’une éventuelle réponse, qu’Alheïri se rendit compte qu’il gaffa assez, concernant l’intonation de sa voix. Il avait fallut que sa gorge lui fasse des siennes en cet instant précis. C’en était tellement chiant, qu’il s’étonna même que la jeune fille se retourne vers lui. Certainement par politesse ? Il avait un doute, et il eut raison de l’avoir à la seconde qui suivit le pivotement de la petite fleur vers lui. Un râle. Ouais. Un simple râle. C’est ce qu’elle sortit en guise de salutations. Enfin, j’disais ça, mais je ne disais rien, vu que mon protagoniste n’eut mieux fait, quand on regardait la situation de plus près. Et elle avait même raison. M’enfin, je m’égarais. Là n’était plus vraiment le problème direct. Car voyez vous, la femme prit une posture sérieusement menaçante, après qu’elle l’ait toisé de bas en haut, sans gêne apparente. Il avait fait de même pendant ce laps de temps lui aussi, cependant, ses lèvres étaient serrées, et sa contenance un brin coincée. Belle, elle était, c’était indéniable, mais le ressentiment actuel qu’elle avait à l’égard de son nouvel interlocuteur, froissait désagréablement son visage. C’était dommage. Et il était même prêt à parier, voir mettre sa main droite au feu, qu’elle allait lui faire mordre la poussière verbalement. Déclic qui eut raison d’être, vu que s’en suivit phrases désagréables ponctuées par un rappel à l’ordre, et une moralité qui avait tout son sens. Le pauvre, prit une mine de chien battu en tordant sa bouche vers le bas, et baissa son visage, en s’écroulant lentement au sol, comme si à chacune des accentuations de sa voix féminine, tombait sur sa tête, un grosse masse de plomb, en plus d’une ambiance morne autour de sa personne, capable de faire fuir quiconque l’approcherait. Comme un homme en mode déprime, le colonel si respecté par son charisme, et son calme à tout épreuve, venait d’être mit K.O par les simples mots d’une jeune fille. Scène rigolote, ses yeux tournaient comme des spirales hypnotiques, en plus de la quantité de larmes qu’il versait inconsciemment, un filet de morve pendant à l’air libre par le biais d’une de ses narines. Il finir par s’avachir complètement sur le sable de la ruelle, ou plutôt s’allonger complètement sur le sol, l’regard pointé vers la voute céleste. Des nuages ? Il y en avait en quantité énorme. Cela pouvait paraitre fou, mais bien que n’étant point navigateur, Salem sentit une averse prochaine. En plus de l’éboulement, ça promettait d’être assez dangereux, et ce malgré les protections du village. Fallait-il qu’il commence à rechercher ses membres dans le but d’avertir les villageois ? Une grosse goute d'eau comme on les voyait dans les animes comiques, apparut soudainement sur l’une des tempes de Salem. Il y avait deux problèmes d’abord. Sinon que trois, si on voulait bien compter, le troisième étant une de ses mauvaises habitudes…

Le premier était de présenter ses excuses les plus plates à la fille qui en attendait, et qui le prendrait certainement pour un fou, après tout le cirque qu’il eut orchestré. L’second était la recherche particulière de Rhum. N’importe quelle marque ferait l’affaire tant qu’il s’agissait de ce breuvage. Il ne ferait pas de caprices, n’étant lui-même pas si compliqué de nature. L’dernier problème… Bah… C’était… Sa position. Car oui, paresseux de son état, Alh’ ne voulait plus fournir des efforts, histoire de se lever. D’ailleurs, et sans mentir, c’était assez confortable. Personne ne pouvait aimer se coucher sur le sable, par éthique, ou par peur de se salir les vêtements, mais lui, oui. Il était même bien placé pour aimer le sable. Avec lui, c’était toujours comme ça, quand bien même sa vessie était pleine d’urine. La flemme. Son plus grand défaut. Au point qu’il décrivit une moue découragée, en fixant toujours le ciel qui allait s’assombrir d’un instant à l’autre, en plus du vent qui commençait à devenir lourd, favorisant la création d'une poussière environnante. C’était commode certes, mais il fallait qu’il se remette débout. Tout en prenant une profonde inspiration, Alhéïri voulut faire un relevé carpé, mais il se contenta de redresser simplement son torse. Assis, il replia une de ses jambes vers lui, ainsi que l’autre, de sorte à avoir la position du lotus. Il porta ensuite sa main droite sur le bas de son dos, en plissant un œil…

• Aie aie aie… Mon dos… Ca fait mal… Si seulement j’pouvais avoir un massage… Haaaannhaaaaan…

Soupir. Le colonel regrettait vraiment Marineford, avec toutes ses belles filles qui allaient le masser, volontiers. La vie était dure. Vraiment dure, mais il nécessitait aussi qu’il se déconnecte des petits rêves bien affectueux pour revenir à la réalité des choses. Parce qu’avec son sourire disgracieux en pensant aux belles formes de ces filles, moulées dans un uniforme parfait d’infirmière, il n’arrivait, et n’allait arriver à rien. Ce besoin n’était même pas comparable à son envie de boire. Car sa gorge enflammée, le fit toussoter par la suite de toute cette mascarade en solitaire. Son visage redevint on ne peut plus sérieux, et avec toute la peine du monde, il finit par se relever du sol. Il épousseta son pantalon, et réajusta sa chemise d’officier sur ses épaules. Quels étaient ces hurluberlus qui pensaient à faire un vêtement aussi ample ? N’en parlant même pas de ceux des pauvres amiraux. Rien qu’à cause de cela, l’envie de gravir un jour les hautes marches de la marine ne lui frôlait même plus l’esprit comme avant. C’était un rêve lointain. Non pas complètement perdu, mais assez lointain. Sa place de colonel et sa renommée lui suffisait déjà. Pas besoin de plus de responsabilités comme ça…

• Veuillez accepter mes excuses les plus plates, Demoiselle.

Ton et visage relativement doux, Alheiri avait enfin formulé ses excuses. Il se pencha légèrement en avant, et ajusta la paume de sa main sur sa poitrine, comme pour ponctuer la sincérité de ses dires. Il aurait pu lui crier dessus, lui forcer la main, mais à quoi bon ? N’était ce pas l’un des rares hommes de la marine qui prônait le respect entre les races quel que ce soit le grade militaire, ou le statut sociale ? Il n’était pas individu à forcer le respect par la violence. Oh que non ! Et il avait approuvé les dires de cette femme, qui avait absolument raison. Sans broncher. Se redressant de manière normale pour conclure, le colonel forma un beau sourire, arborant une posture des plus décontractées.

• C’est pas vraiment dans mes habitudes de crier sur quiconque, mais ma gorge encombrée, ne m’avait pas vraiment facilitée la tâche, de peur que vous ne m’entendiez pas. Je l’admets, j’ai aussi mal choisi mes mots, et c’est pas vraiment de bol. Je comprends tout à fait votre colère. S’faire crier dessus, de surcroit pas un inconnu, n’est pas chose aisée. Veuillez re-accepter mes excuses. Je suis le colonel Fenyang… Alhéïri Fenyang.

Si son nom était bien connu à Grand-Line et à East Blue, il n’en savait rien, et s’en fichait concernant son cas à North. Tout ce qu’il voulait, c’était rattraper un gugusse qui lui avait échappé, et repartir rapidement à Grand line sans histoire. Et sans lui laisser le temps de répliquer, le capitaine du 20ème contingent réédita sa demande avec beaucoup plus de prévenance.

• Voudriez-vous, s’il vous plait m’indiquer un bistro ? J’vous en serais fort reconnaissant.

Spoiler:

I’m the one who really
love you, baby..

J’écoutais mon interlocuteur qui avait l’air de se plaindre de douleur dans le dos, s’enfonçant progressivement dans le sol à chacune de mes remarques vis-à-vis de son comportement. Si un jour, l’on m’avait dit que je mettrais à terre un colonel rien qu’avec des mots, sûrement vous aurez-je ris au nez tellement la scène me semblait burlesque et improbable. Mais j’avais visé juste, comme toujours, et le colonel s’excusa platement en prétextant que le manque d’alcool perturbé sa concentration et sa façon d’être, que sa gorge était sèche et qu’il ne pouvait correctement la contrôler, ou encore qu’il craignait que je ne le remarque pas. Difficile de ne pas le remarquer, n’est-ce pas ?
Enfin, j’abrégeai ses complaintes d’un mouvement lasse de la main, levant les yeux au ciel avec une pointe d’agacement dans le regard, je le priai de se relever d’un coup d’œil pour ajouter d’une voix franche :

« Vous avez vraiment des excuses bidons, vous, les marins. Mais soit, j’accepte de te pardonner, Alh’. »

Beaucoup plus court et concis qu’Alhéïri (que je n’étais pas sûre de correctement prononcer), j’optai pour un surnom tronqué qui me semblait convenir à sa personne. J’étais certes, face à un colonel de la marine, mais je n’en avais que faire de cette information, car je n’étais pas du genre à m’arrêter à ça. Pourtant soucieuse de paraitre un tant soit peu correcte aux yeux de mon interlocuteur (et surtout pour savoir si ça ne le gênait pas que je sois aussi à l’aise et que je me laisse autant de permission à son égard), je lui fis un maigre sourire poli pour ajouter d’une voix que je voulais courtoise :

« J’ai bien le droit de t’appeler Alh, pas vrai ? Au vu de la façon dont tu m’as parlé, ça serait la moindre des choses… »

Manipulation pure et simple, je vous l’accorde. Oui, je tentais de le culpabiliser… Et vu que je le tutoyais depuis le début de cette conversation houleuse, je pensais qu’il ne serait pas contre un petit surnom « affectif », disons, pour détendre l’atmosphère. En tout cas, il ne me traversa pas la tête une seule fois de décliner mon identité à mon nouvel interlocuteur. Plus longtemps je restais inconnue à ses yeux, plus longtemps je me sentirais à l’abri de tous soupçons concernant mes activités extra-professionnelles qui pourraient justement le déranger. Je n’étais peut être pas connue des services des marins, mais je ne voulais pas prendre le risque de l’être, compte tenu de mes actions passées qui avaient causé bien des tords à ces dits « services ».

« Les tavernes ici ne sont pas les plus fournies en alcool, ni les mieux fréquentés, mais si cela te convient quand même, suis moi. Je te conseillerais juste de ne pas m’attirer de problème… »

Je lui fis un petit sourire, tournant les talons en l’incitant à me suivre jusqu’au bar le plus proche.

« C'est-à-dire qu’ici, on me connaît et je ne suis pas réputée pour être des plus agréables avec les marins en générale, et surtout, que je tiens à cette réputation, tu me suis ? »

Me faisais-je un malin plaisir à piétiner toutes formes d’amitiés que je pourrais éventuellement obtenir d’une relation avec un marin ? Probablement. C’est dire que je ne tenais absolument pas à me lier avec qui que ce soit d’autre ici, encore moi une personne qui travailler pour le gouvernement. Et j’avais une vision assez arrêté sur ces personnes en questions : des gens corrompus, vils et asservis, qui se pliaient à une justice tout autant corrompu, parfois pire que la piraterie, une atteinte aux droits et à la liberté des Hommes… En sommes, tout pour me faire vomir. Ce que je comprenais encore moins, c’était l’attachement de certain à vouloir à tout prix faire respecter cette pseudo justice, alors qu’elle n’était pas, à proprement parler, adaptable à tous les individus, et que pour qu’elle le devienne, il était important de « supprimer » les individus qui ne rentraient pas dans ce moule (les pirates, donc). A vomir, comme je disais.

Nous passâmes les portes de la taverne et ces dernières grincèrent sur notre entrée, devoilant une salle pleine à craquer de gens et d’autres, malgré l’heure matinale. La pière était plongée dans une obscurité étrange et un peu angoissante lorsque l’on n’en avait pas l’habitude, l’on voyait les angles du bar, dans lesquels se tapissaient certains truands de passage sur l’île qui faisaient escale en même temps que le colonel. L’air chargé de fumée et d’une odeur d’alcool, se mêlant à la sueur des hommes et pochtrons du coin, me remontait l’estomac et me le retournait, c’était assez désagréable. Pourtant, la déco plaisait à l’œil : c’était un bar d’un type irlandais, avec du tissu sur les chaises, du bois foncé pour les meubles, des tables rondes, des lampes descendants du plafond, une petite scène en fond…
Un homme taillé en V était placé au bar et nous fixait de toute sa hauteur. Il commença par le grand zigoto derrière moi, le détaillant du regard en se demandant à qui il avait a faire. A Rock Town, il n’était pas courant d’avoir des visiteurs comme Alh’, pour dire. Puis, il posa ses yeux sur moi et me reconnut immédiatement, me saluant d’un hochement de tête, Bill (puisque c’était son nom) pointa la table habituelle ou j’avais l’habitude de me rendre étant une alcoolique notoire, si l’on pouvait dire. Je n’avais aucun problème avec l’alcool, entendez bien ! Non, j’avais juste un penchant pour les fêtes et les soirées arrosées, ou l’on pouvait discuter, danser et festoyer sans que les barrières culturelles et sociales ne s’imposent. Traitez-moi de pochtronne, et je vous dirais que vous n’êtes pas totalement dans le faux. Ni totalement dans le vrai. De toute façon, j’avais à présent assez d’expérience en matière d’alcool pour très bien le tenir… Ma dernière cuite remontée à si loin que je n’en avais même plus le souvenir !
Nous allâmes jusqu’à ma table donc, et nous installâmes.

« Un rhum pour le colonel, Bill ! Et pour moi, comme d’habitude ! lançai-je au gérant avec un sourire. »

Comme d’habitude signifiait, bien entendu, son meilleur vin.